Comment fonctionne un acompte sur salaire ? Qui peut le demander ?
Selon une étude publiée en 2020 par le comparateur de banques en ligne, Panorabanques, 38 % des Français sont à découvert en fin de mois. Des Français sans économies ni marge de manœuvre : le moindre imprévu peut compliquer la situation financière des ménages concernés. Une difficulté passagère à laquelle l’employeur peut répondre grâce à l’acompte sur salaire. Un dispositif prévu et encadré par le Code du Travail qui mérite quelques éclairages. Tour d’horizon d’une solution concrète pour faire face à une dépense urgente et exceptionnelle.
Un acompte sur salaire est un versement anticipé de l’employeur à l’employé d’une partie de sa rémunération mensuelle. La somme débloquée correspond à des heures de travail déjà effectuées. L’article L.3242-1 du Code du travail stipule que si le salarié est normalement rémunéré mensuellement, il peut demander un acompte correspondant à la quinzaine (soit la moitié de son salaire mensuel). Dans les faits, rien n’interdit de demander un acompte avant ou après la quinzaine correspondant aux nombres de jours effectivement travaillés. L’acompte sur salaire versé est ensuite déduit du salaire du mois concerné.
Ce cadre général peut être amélioré par la convention collective de la branche concernée ou un accord d’entreprise. Dans de nombreux cas, les salariés peuvent bénéficier d’un acompte plus élevé ou correspondant à 50 % de leur rémunération avant le 15 du mois. Le salarié faisant face à un imprévu financier a tout intérêt à se rapprocher du service comptabilité de son entreprise, ou à consulter son représentant syndical. Une solution simple et plus économique que le recours à l’emprunt, notamment au crédit permanent renouvelable proposé par les banques. Contrairement à ce dernier, l’acompte sur salaire n’est pas assujetti à un taux d’intérêt et ne coûte donc rien au salarié effectuant la demande.
Pour obtenir un acompte sur salaire, il vous suffit d’en faire la demande à votre employeur. Tous les salariés mensualisés peuvent demander un acompte sur salaire à leur employeur. Et ce, qu’ils soient titulaires d’un contrat à durée indéterminée (CDI), d’un contrat à durée déterminée (CDD), d’un contrat de professionnalisation, d’un contrat d’apprentissage ou qu’ils exercent à temps complet ou temps partiel. Cette facilité financière est réservée aux seuls employés mensualisés. Elle ne concerne donc pas les employés temporaires, les saisonniers, les travailleurs à domicile ou les intermittents, qui n’entrent généralement pas dans cette catégorie.
Dans la fonction publique d’État, hospitalière ou territoriale, le versement d’un acompte sur salaire est nettement moins évident. Les trésoriers s’abritent derrière le principe de la mensualisation du salaire pour ne pas accepter le versement de l’acompte sollicité. Interrogé le 18 avril 1994 à l’Assemblée nationale sur le sujet, le ministre de l’Économie a rappelé le décret n° 62-765 du 6 juillet 1962 : le traitement et les émoluments des agents publics se liquident par mois et sont payables en fin de mois. Ne sont autorisés que les acomptes pour frais de déplacements ou pour les agents recrutés par contrat de droit privé.
L’article 3242-1 du Code du travail énonce bien qu’un « acompte correspondant, pour une quinzaine, à la moitié de la rémunération mensuelle, est versé au salarié demandeur ». L’employeur ne peut donc pas se soustraire à cette obligation prévue par la loi. Cette obligation ne vaut néanmoins que pour un seul acompte dans le mois ! L’employeur peut ne pas donner suite à une seconde demande effectuée durant ce dernier.
En cas de refus de l’employeur en dehors de ce cadre légal, l’employé peut dans un premier temps le rappeler à ses obligations et se faire assister par le représentant du personnel de l’entreprise. Ce rappel doit se faire par lettre avec accusé de réception (LRAR). En effet, si le litige persiste, ce courrier constituera un élément de preuve lorsque l’employé fera valoir ses droits aux Prud’hommes.
Non seulement la loi ne permet pas à un employeur de refuser un acompte sur salaire dans le mois, mais le bon sens devrait l’inciter à le proposer lui-même dans certains cas. Les difficultés budgétaires d’un salarié génèrent un stress financier pesant inévitablement sur sa compétitivité. La situation peut même entraîner des troubles psychiques pouvant aller jusqu’à la dépression. Une vraie maladie entraînera un arrêt de travail potentiellement long. L’employeur, attentif à son personnel, détectant un mal-être, a donc tout intérêt à faciliter la résolution du problème pour retrouver un salarié pleinement disponible.
Par définition, l’acompte sur salaire concerne des heures de travail déjà effectuées. L’avance sur salaire concerne, comme son nom l’indique, des heures de travail à venir. Non prévue par le Code du travail, l’avance sur salaire peut donc être refusée par l’employeur. Lorsque l’employeur accepte malgré tout le versement d’une avance sur salaire, cette dernière se rembourse généralement petit à petit en retenues sur salaire sur plusieurs mois.
Le Code du travail autorise l’employé à solliciter un acompte sur salaire une fois par mois. Pour obtenir 50 % de son salaire, celui-ci doit donc effectuer sa demande après le 15 du mois. L’employé désirant obtenir un acompte sur salaire doit formaliser sa demande par courrier (préférable) ou par e-mail. Cette demande dûment datée et signée doit mentionner l’identité du salarié, son poste au sein de l’entreprise et bien sûr le montant de l’acompte sollicité.
Les grosses entreprises mettent généralement à disposition de leur salarié un espace personnel digitalisé. Ce dernier propose un formulaire à remplir pour effectuer très simplement la demande d’acompte sur salaire. Au moment du versement de l’acompte, l’employeur doit pour sa part faire signer un reçu au salarié concerné. Seul ce document apportera, en cas de litige, la preuve du règlement de l’acompte sollicité. En effet, d’un point de vue légal, la mention de l’acompte sur la feuille de salaire ne suffit pas à prouver la réalité de ce paiement. Le reçu d’acompte est donc un document important dans la relation employeur-employé.
Bon à savoir : L’employé sollicitant une demande d’acompte sur salaire n’a pas besoin de justifier cette dernière auprès de son employeur.
Le montant de l’acompte est déterminé par le salaire de l’employé et le nombre d’heures travaillées. La loi limite le montant de l’acompte à la moitié du salaire mensuel de l’employé. En dessous de ce seuil, le salarié peut demander un acompte du montant qu’il souhaite. Un accord d’entreprise peut néanmoins prévoir un montant d’acompte supérieur au montant légal et une limite plus élevée de demandes recevables.
À noter qu’en vertu du plafond en vigueur pour le versement du salaire en espèce, l’acompte sur salaire inférieur ou égal à 1 500 euros peut être versé en liquide. Au-delà de 1 500 euros, l’acompte sur salaire doit être versé par chèque ou par virement bancaire.
Monsieur X bénéficie d’un salaire brut mensuel de 1 400 €. Il décide de demander un acompte sur salaire portant sur 10 jours de travail effectué. 1 400 / 30 × 10 = 466,66. Son employeur lui versera de manière anticipée la somme de 466,66 € correspondant à 10 jours de travail déjà effectués durant le mois concerné.
Quid des charges sociales ?
L’acompte sur salaire versé par l’employeur au salarié qui en a fait la demande ne tient pas compte des charges sociales. La somme reste bien évidemment assujettie à ces dernières, mais leur prélèvement s’effectuera en fin de mois sur la feuille de salaire. Attention, en cas de modification du taux des prélèvements sociaux (CSG et RDS par exemple), le taux applicable à l’acompte est celui en vigueur au moment du versement de ce dernier. L’acompte sur salaire apparaîtra sur cette dernière en déduction du montant net versé.
L’acompte sur salaire est pour l’employé un excellent moyen de faire face à un imprévu budgétaire. L’employeur, tenu légalement d’accéder à sa demande, se doit de le faire de bonne grâce. Un employeur assumant avec diligence ses obligations envers ses salariés fait preuve de considération pour ces derniers. Un élément capital en termes de rétention des talents. L’application des dispositions du Code du travail en la matière relève donc tout autant de l’empathie que du pragmatisme !
Les points à retenir :